J'ai appris de nouveaux mots et ça me fait chier.
Des mots créés pour mettre une définition sur des concepts, des principes pré-existants et déjà mis en application inconsciemment par des game designers, sans justification pseudo-intellectuelle élévatrice du JV (vous allez voir, c'est gratiné). C'était juste pratique et répondait à des contraintes de temps et d'argent. Bien sur, si ces termes sont utilisés pour une analyse à postériori, je ne vois aucune raison de continuer cet article, et comme vous pouvez le remarquer, y'a encore des mots après le point qui termine cette phrase. Parce que ces notions, désormais affublées d'un nom, d'une définition et conditionné dans une putain de boite, sont utilisées en amont, pour construire un game design efficace. Reverse Mode !
Conditionné. Première problématique. On conditionne l'esprit à une définition. On cadre, on enferme la créativité requise pour créer le gameplay, en plus de la scinder en plein de petites boites étriquées et proprement disposées. Et qu'est ce qu'il se passe dès que, disons, une communauté par exemple, est scindée en plusieurs groupes ? C'est la guerre. Seconde problématique.
J'explique.
L'un de ces nouveaux mots, le plus important et celui qui est un peu la source de ce bottage de cul, c'est "meta-gameplay", nommé également dans la foulée, "l'économie du gameplay", nom quand même vachement plus explicite. Mais attention, on parle pas de l'économie au sens financier (la monnaie virtuelle dans un jeu, etc, ), mais on parle bien d'économiser du gameplay. Et économiser du gameplay, une boite de jeu le fait tout les jours. Simplement par souci de rentabilité, parce que c'est pratique. Parce que ça peut aboutir à un truc aussi fun que de coder un truc tout neuf. Mais surtout, parce que ça économise de l'argent, du temps et ça réduit le risque d'erreur. Rien de mal à ça. Cela dit, économiser, c'est bien beau, mais sans que le joueur s'en aperçoive, c'est encore mieux, et à dire vrai, c'est la règle d'une bonne économie de gameplay. Mais c'est pas l'sujet !
Cherchez pas sur Google, je m'en suis chargé. Faut savoir que j'ai passé trente bonnes minutes à farfouiller et à contacter un pote qui sort d'une école de JV. J'ai finalement trouver un bout de PDF en anglais qui parle de ce meta-gameplay de mes deux boules.
Traduit et commenté :
Le core gameplay peut être utilisé pour bâtir les dites-activités de core meta-gameplay. Pour le joueur, ça ressemble à de "nouvelles" activités alors qu'elle sont issues des mécaniques du core gameplay. En fait, ce sont des activités du Core Gameplay (Note du chat : Putain, quelle branlette ! Tout ça pour ça.), mais avec une sémantique propre et qui ne requière pas de modifier les mécaniques de jeux déjà créées (Note du chat : en les recodant, donc)
On comprendra mieux avec un exemple :
Dans Super Mario Bros., le core gameplay, c'est "éviter des ennemis" et le déplacement du personnage, c'est la mécanique de gameplay principale. Le saut, dans ce système de déplacement, à un rôle important, vue qu'il est utilisé à la fois pour éviter les ennemis et atteindre la fin du niveau. Ca aurait pu être suffisant, en terme de game design pour procurer assez de fun aux joueurs. Toutefois, Mario peut aussi sauter sur la tête de ses ennemis (la plupart, du moins) pour les tuer. Donc, tuer des ennemis est perçu par le joueur comme une autre activité de gameplay. Sauf que, quand on y pense, "tuer des ennemis", c'est rien d'autre qu'une version déguisée de "Sauter". On peut donc en conclure que, dans Super Mario Bros., tuer des ennemis est une activité de core meta-gameplay, puisqu'elle peut être effectuée en utilisant une mécanique de jeu principale tel quel, et donne une nouvelle définition à l'action "Sauter. (note du chat : Bref, on ne "Saute" plus mais on "Attaque". La boite de Kleenex est sur la table.)
L'analyse est tout de même intelligente et intéressante. Il n'y a pas de problème, SI CA RESTE UNE ANALYSE a POSTériori ! Mais c'est pas le cas, car plus loin :
Les activités de meta-gameplay sont de très puissants outils de design parce qu'elles peuvent enrichir le jeu et les actions disponibles pour le joueur, sans que celui-ci ait besoin d'un nouvel apprentissage spécifique pour les maitriser.
Et c'est le drame. C'est un outil. Un game designer doit donc dorénavant réfléchir au meta-gameplay selon cette définition imposée si il veut espérer faire un game design intéressant (en théorie, hein) Je ne suis pas d'accord parce que le core-problem (LAUL), le truc qui fait que je suis turbo-vénèr' est :
On conditionne une notion très large ayant de multiples nuances, dans une putain de boite étriquée auquel on colle un nom pompeux, une définition réductrice et surtout, terriblement restrictive.
On a donc un genre de gameplay dans le core gameplay, mais qui n'est pas du gameplay émergent, et qui finalement peut très bien être assimilé à ... du core gameplay. (le mec qui a pondu cette définition doit être un sacré contorsionniste pour arriver à se bouffer la queue comme ça. Et quand je parle de queue, je parle du truc de 2cm issu d'une époque où on se pendait aux arbres avec.)
Mais pas de panique ! Des nouveaux mots dans le JV, y'en a tout les mois et on finit par les utiliser que rarement. Mais par principe (et d'expérience), il vaut mieux mettre en garde ceux qui serait susceptible de vouloir dégainer Marius le Phallus pour communiquer avec leurs collègues (surtout si ceux-ci sont des "vieux-game-designer-énervé-et-refractaire-à-l'evolution-d'une-industrie-on-est-plus-en-1986").
Voici un exemple.
Perdu par ces nouveaux termes à la mord moi la rate, que j'ai du mal à cerner, qui me font perdre pied et me colle le doute, j'en parle à mon frangin, game designer. Le premier exemple qui me vient à l'esprit, c'est sur Alice aux Pays des Merveilles sur DS sur lequel ont en a chié des ronds de bonnets (lui au GD, moi au LD). Dans le jeu, la chenille possède la capacité d'inverser la gravité. Toutefois, cette capacité est limité à des endroits que l'on a défini et ceux-ci sont indiqué par un fumé verte. A un moment, dans les marais, j'ai utilisé cette feature pour que le joueur pense que son personnage marche dans le reflet d'un lac. Il prend un téléporteur et se retrouve la tête en bas, dans le lac. Pas de fumé, aucune action à faire pour le joueur. MAIS, j'ai détourné la feature principale pour en faire quelque chose que l'on pense nouveau. Sauf que niveau code, rien à changé.
J'illustre avec un screenshot et un croquis
On voit bien la fumée verte, zone de changement de gravité : les persos ont la tête en bas. Si il en sorte, ils tombent.
Ici, pas de fumée verte, mais les persos ont aussi la tête en bas, on à l'impression qu'ils se trouve dans le reflet de l'eau (oui, c'est d'l'eau, j'ia du faire un croquis parce que j'ai aps de screenshot sous la main !)
Pour mon frangin, ce n'est pas du méta-gameplay. Pour moi ça en est. BING.
Imaginons que l'on ai eu cette discussion en pleine prod' du jeu, à cause de la tâche :"rajouter un peu de meta-gameplay dans les marais". On serait parti de la définition universelle (celle décrite plus haut), on aurait déblatéré pendant une heure, vu qu'on est pas d'accord, sur son application et au final, perte de temps, énervement et pas sur que la séquence soit gardé alors que ... elle est FUN ! Fun même si elle rentre pas dans cette putain de case.
Bref, tu vois une nouvelle contrainte et une restriction de la créativité, simplement pour coller à la définition. On te pose des oeillères qui t'empêche de prendre du recul.
Second exemple, et je vais m'écarter du game design pour lorgner du coté des bergers, les marketeux et de leurs moutons, appelé aussi "consommateurs" : les termes de "casual gaming" et de "hardcore gaming".
On a un magnifique exemple du scindage d'une communauté (les joueurs), de guerre fratricide, tout ça parce que des andouilles ont voulus définir un concept en le collant dans une boite (qui ressemble à un cercueil). Ca vient de Nintendo.
A la base, "casual", ça veut dire "occasionnel". Un truc que tu mets de temps en temps, auquel tu joue de temps en temps et qui doit donc être pratique ou facile à assimiler, à commencer et à arrêter. Et les jeux casuals, ça existe depuis des années : mots croisés, sudoku, jeu de labyrinthe, jungle speed, rummiskub, etc. Rien de bien péjoratif, bien au contraire, n'est-ce pas ? Mais voilà, on a eu une pléthore de jeux sans génie sur Nintendo DS puis sur Wii (puis sur toute les machines), reprenant les idées de Nintendo : Nintendogs, Kawashima, Décore ton appart' pour t'imaginer moins pauvre, etc. À partir de là, "casual" est devenu synonyme de "jeux de merde, jeux trop facile, jeux de noob". Moi, je peux utiliser ces qualificatifs pour des jeux "hardcore" aussi.
Hardcore gaming, donc.
Pour la majorité des vieux joueurs, hardcore, c'est un jeu difficile. Difficile à finir mais pas difficile à jouer. Si si. Pour la majorité des moutons, c'est un jeu "mature, complexe et difficile (mais niveau prise en main, ce qui en fait un jeu difficile)". Bref, du vrai jeu vidéo, il parait. Et maintenant, on a une majorité de trous qui pue qui se mettent joyeusement sur la gueule (enfin, généralement, ils se prennent tous pour des hardcore gamer, donc c'est du friend kill) pour allumer tel jeu qui se "casualise", pour pleurnicher sur la trop grande facilitée du nouvel opus de leur jeu de "vrai joueur", à cause de marketeux qui ont décidés de définir, de poser un nom sur le concept, sachant très bien que leurs moutons allaient faire monter la sauce et éteindre définitivement leur cerveau. C'est réussi. Ces anus conditionné au PQ Moltonelle (bien douillet pour leurs certitudes) sont incapable de se dire que Super Mario Bros ou PacMan, c'est du casual game (au sens premier, parce qu'il n'y a que ça qui compte) et qu'ils deviennent hardcore au fur et à mesure de leur progression, tout comme Super Meat Boy, et qu'ils peuvent se faire défonce par ma femme à Diner Dash ou Plants VS Zombies ou par Papy au scrabble.
Vous voyez où je veux en venir ? Nous, développeur, quand on conçoit un jeu, on a un anneau nauséabond avec un corps autour, qui débarque pour nous dire de rendre tel ou tel aspect, plus "hardcore" ou plus "casual", version mislead. Et au final, on doit contraindre notre créativité à cette définition en se passant d'éléments qui pourraient vraiment servir le jeu (et taper quand même dans la cible choisie), mais qui ne rentrent malheureusement pas dans cette case.
Ou du moins de ses méthodes ? Peut être.
Certains me diront certainement qu'un bon game designer sait aller au-delà des contraintes (c'est ce que l'on fait chaque jour), que c'est grâce à celles-ci qu'il est capable de pondre un game design cohérent et carré. C'est un fantasme. Et que, comme tout fantasme, il peut se réaliser. Mais à quel prix ?
J'ai donc peur de ces nouveaux termes, des termes d'analyse avant tout, du formatage qu'ils apportent à des notions qui n'en ont jamais eu besoin. Qu'une armée de nouveaux débarque avec ces trucs dans la tête.
Quand on voit ce qu'un "junior" (encore un terme de merde) m'a balancé, la voix pleine de passion (en fait, c'était par message privé sur Gameblog.) :
"Après j'ai également vu des soit disant "Expert senior" brasser de l'air pendant que des petits juniors sous-payés abattaient un travail de titan pour faire monter un jeu à 80+"
Faire monter un jeu à 80+ ... Oui, Oui. 80%. Une note quoi. Donné par un site web. Un pur discours marketing venant d'un type qui n'en est pas un.
Mais soyons francs et réalistes. Le jeu vidéo a énormément évolué, c'est devenu un média populaire et ces mises en boites font partie des conséquences. Comme le cinéma, la musique, la littérature, la peinture, comme tout les arts, il faut qu'on l'élève intellectuellement, que tout soit expliqué, philosophé, étudié, analysé pour être théorisé. Parce qu'il y a des écoles maintenant et ces écoles ont besoin de théoriser ces concepts, ces notions pour en faire des cours palpables pour leur élève. Les studios ont besoin de sélectionner les candidats, de jauger leurs mode de réflexion. Bref, pour que l'on puisse apprendre et comprendre le jeu vidéo. Qu'il se concrétise pour le commun des mortels (ceux qui ne bossent pas dedans, donc, ou qui veulent y entrer).
C'est très bien, mais j'ai pas envie de bosser avec des mecs incapables de sortir des carcans dans lesquels on les a élevé.
Vous imaginez si je peux plus m'exprimer dans mon métier, parce qu'on m'impose de restreindre ma créativité pour la gloire de l'élévation intello-onanismique du jeu video marketté ?
"Tant que tu fais pas rentrer de force des mécanismes dans des catégories qui leur conviennent pas ..."
Nico - Copain Level Designer.
Sage parole qui résume tout bien. Bon, ben voilà, j'ai écrit un pavé pour rien.